L'analyse
de la Fondation des Femmes

La révélation de l’affaire Weinstein qui a éclaté en octobre 2017 et le mouvement #MeToo qui a suivi a indéniablement fait éclater au grand jour la réalité des violences sexuelles en permettant à de nombreuses femmes victimes de trouver le courage d’en parler publiquement. Une fois l’omerta levée, que faire de ces crimes qu’on ne peut plus ignorer ? Si les femmes en ont d’abord parlé à leurs proches ou se sont exprimées sur des réseaux sociaux, beaucoup ont aussi poussé la porte des commissariats, demandant à ce que justice leur soit rendue. Ainsi, par rapport à 2016, le nombre de faits de crimes et délits sexuels enregistrés par les services de police et de gendarmerie a connu une hausse de 31,4%.

Si l’augmentation est notable, le nombre de plaintes reste infime par rapport au nombre de victimes selon les enquêtes de victimation. Beaucoup de Français.es ne se tournent pas vers la justice. Cela s’explique notamment par les difficultés à porter plainte, telle que la peur de ne pas être crue ou que sa parole soit mise en doute, deux raisons qui arrivent en tête, pour 73%* des Français.es. Logiquement, 56%* des Français.es déclarent faire confiance à la police pour bien prendre en compte les victimes et agir justement.

Le dépôt de plainte n’est souvent que le début d’un long chemin judiciaire, semé d’embûches et de déceptions. Les éléments de preuves, particulièrement lorsque les faits sont anciens, sont souvent difficiles à rassembler et à faire accepter comme tels. Ainsi, sur les 12 333** affaires de viols traitées par les parquets en 2017, 8 700** ont été classées sans suite. Tentant parfois d’éviter les aléas du jury populaire d’une cour d’Assises, d’autres instructions et même parfois l’accusation préfèrent « correctionnaliser », c’est à dire requalifier un viol en agression sexuelle pour le faire juger en cour correctionnelle, par des juges professionnels. Une manière d’avoir plus de chance de voir l’agresseur condamné, certes, mais pas pour le crime commis. En conséquent, le taux de condamnation pour viol est en France très faible, avec 1 014 viols condamnés en 2017, un chiffre en baisse de 31,5% depuis 2008. A peine plus de 1% des viols seraient condamnés.

* sondage de Kantar pour la Fondation des Femmes et Femme Actuelle,  février 2018

** Ministère de la Justice, SG/SEM/SDSE, fichier statistique du casier judiciaire national, exploitation DACG, dans La lettre de l’Observatoire Nationale des Violences Faites aux Femmes n°13, novembre 2018 

“Vous avez eu des menaces, des coups ? Non, alors c'est pas un viol !”

- Témoignage issu du Tumblr Paye Ta Police